Avoir accès à ce que nos principaux interlocuteurs pensent de notre travail est riche en enseignements et très utile pour nous aider à progresser. Car à moins d’avoir fait un travail de développement personnel, nous avons rarement conscience de ce que nous faisons bien, ou moins bien, et pouvons même être convaincus qu’il n’y a pas d’autre option que faire ce que nous faisons.
La démarche dite 360° consiste à recueillir le feedback de ceux qui travaillent avec nous au quotidien : nos collaborateurs directs (si on a une responsabilité hiérarchique), nos collègues, notre(nos) responsable(s), éventuellement nos clients ou fournisseurs internes ou externes. C’est le croisement de tous ces regards, selon les différents points de vue et dans différents contextes, qui fait la richesse de la démarche. Mais pour qu’elle réponde pleinement à ses objectifs, à savoir développer la qualité de la communication interpersonnelle et créer une dynamique positive de changement, un certain nombre de précautions s’impose…
Je viens juste d’être promue Responsable du Développement RH quand je suis amenée à plonger pour la première fois dans la lecture d’un volumineux rapport 360°. La démarche a été mise en œuvre conjointement par le manager et le Responsable Ressources Humaines pour amener une collaboratrice à prendre conscience de ses lacunes et déclencher une remise en cause de sa part. Et on me demande d’aider cette collaboratrice à lire le rapport et à bien comprendre les messages passés. L’exercice se révèle un vrai calvaire pour elle comme pour moi ! Elle a parfaitement compris l’intention cachée derrière la démarche. Perpétuellement sur la défensive, son attention se focalise sur les mauvaises notes ou les commentaires négatifs pour essayer de comprendre les motivations des notateurs et trouver les arguments pour se justifier. Pour l’aider à s’ouvrir et positiver, j’ai beau essayer de mettre en évidence les atouts et forces que pointe aussi le rapport, c’est peine perdue. Blessée par la démarche, elle sort de nos entretiens dans une opposition accrue au changement que l’entreprise voulait qu’elle opère. Quel gâchis !
Cette expérience, ainsi que d’autres qui heureusement ont été un peu plus positives, m’ont amenée à être très vigilante sur les conditions de réussite d’un 360°, qui est une démarche courageuse et impliquante pour toutes les personnes concernées, bénéficiaires comme contributeurs.
Les points essentiels à rappeler sont que le 360° :
- N’est que le recensement de perceptions subjectives, qui tiennent compte des besoins et des contraintes propres à chaque contributeur
- S’inscrit dans une logique d’amélioration et de développement, ce qui requiert la création de conditions propices au dialogue et au changement des pratiques
- Garantit l’anonymat des contributeurs, la confidentialité des résultats et ne peut se mettre en place qu’après une communication claire, préparée et réalisée en amont
Pour notre part, nous mettons en œuvre une démarche construite sur mesure avec l’entreprise pour répondre à ses objectifs. Par exemple : faire évoluer les pratiques de ses managers, préparer des collaborateurs à des évolutions, dynamiser les talents, développer une culture de communication et de feedback à tous les niveaux, etc…
Dans l’ensemble de nos démarches, nous ne faisons intervenir que des consultants qui ont fait un travail de développement personnel important, qui sont certifiés au coaching et qui adoptent vis-à-vis de chaque bénéficiaire une posture d’écoute bienveillante, sans tomber dans la complaisance.
Enfin, l’outil que nous utilisons (accessible par un lien internet) permet de collecter des feedbacks respectueux et constructifs, dépourvus de tout jugement. Dans ce but, nous ne demandons pas aux contributeurs de donner des notes d’évaluation mais de répondre à des questions qui peuvent être formulées selon le cas de la façon suivante :
A votre avis, que devrait faire en plus (ou en moins) votre N+1 pour améliorer le fonctionnement de votre département ?
Selon vous, quelles façons de faire devrait développer votre collègue pour améliorer vos interactions mutuelles ?
…
Les contributeurs sont invités à faire leur choix dans une liste de critères qui couvrent la totalité des façons de faire possibles, ce qui permet la consolidation des points de vue et la comparaison avec la propre perception du bénéficiaire.
Réalisée de cette façon, la démarche 360° évite de blesser les bénéficiaires, offre à chacun des pistes de réflexion et impulse une dynamique de développement individuel et collectif, qui peut se traduire par un « avant » et un « après ».
Photo : ŠJů / Wikimedia Commons